En fouillant dans mes souvenirs, je me suis rappelée d’elle...
L’odeur de sa peau, de ses vêtements.
La douceur de ses bras.
C’était tout mou, tout doux.
Un souvenir de réconfort lorsqu’elle m’accueillait et m’embrassait.
Un don de bonheur dans les yeux.
Du deuxième étage d’un duplex d’où elle ne sortait presque jamais,
Il lui tardait de nous voir.
Ma grand-mère maternelle, celle que j’ai le plus connue,
Était une dure de dure.
Car oui, elle en avait connu des misères.
Et pour mieux dire; la vraie misère.
Pauvreté, veuvage en trentaine et huit enfants sur les bras.
C’est en 1946 que la petite dernière arrivât...
Que le mari mourut et qu’elle finit par bâtir seule sa demeure.
Les rats couraient dans l’escalier comme dans la chanson.
C’était, en fait, dans la petite cabane en annexe.
Celle qui servait de logis à la petite famille avant que ne soit terminée la maison.
Lors des temps plus durs, c’était l’orphelinat pour les gars.
Suggestion des Pères si je ne me trompe, pour soutenir et pour leur bien.
Les pères l’auront beaucoup aidée.
Recueillir et éduquer, camps de vacances tristes, l’internat.
Mais c’était ça l’Aide à l’enfance, une forme d’assistanat,
Pour les situations familiales malheureuses.
Elle retournait toujours vite les chercher lors de congés.
Pour les laver, les peigner et s’assurer de leur santé.
Fallait éliminer les poux et les pipis au lit.
Décrotter ses enfants et leur linge, leur donner du "bon manger".
Était-ce la mission rêvée d’une mère?... Je vous laisse deviner.
Pour des enfants impeccables, il fallait sacrifier les rires et les jeux,
Contre le dur labeur, la propreté et le gain du "petit" pain.
Les bonnes sœurs, elles, n’en faisaient peut-être pas tant.
Les pires promenaient les petits, draps souillés sur leur tête.
Pour les punir et qu’ils apprennent, disaient-elles.
Ah que mes oncles les ont haïes,
Et ma grand-mère en a pâti.
Nettoyer, travailler et ordonner avec autorité.
Voilà comment elle, grand-maman, savait mener.
Surtout ne pas perdre le contrôle ou que très rarement,
Une petite crise de nerfs de temps en temps, ça arrivait.
Devant les yeux apeurés de la plus jeune,
Et de la plus vieille aussi, qui servait de seconde maman.
Pas d’assurance ou d’aide sociale, ça n’existait pas vraiment en ce temps-là.
Elle travaillait jour et nuit et au-delà.
Lorsqu’une de ses filles rêvait d’un blouson,
Impossible de le lui demander,
La réponse ne pouvait qu’être non.
Jusqu’au jour où, sur son lit au matin
La petite découvrait le vêtement
Confectionné par maman, entre deux quarts, à la main.
Car son cœur était tendre.
Ses enfants ne manqueraient de rien.
Bouillie, patates et beignets,
On ne saurait jamais qu’ils étaient pauvres ou... à peine.
Je lui envoyais des lettres et des poèmes par la poste à grand-maman.
Tous mes dessins d’enfant comportaient une cigarette.
Hé oui parce qu’elle fumait. C’était la mode.
Elle roulait elle-même son petit plaisir.
Par économie,
Jusqu’à un cancer du poumon,
Qui ne l’a pas emporté fort heureusement.
Fini la cigarette, du jour au lendemain,
Elle vécut une dizaine d’années de plus, jusqu’à ses 83 ans.
C’était une dure de dure ma grand-mère.
Je lui avais appris à nager qu’elle disait.
Sur son flotteur elle faisait aller ses bras par en avant.
"En petit chien grand-maman !" que je lui disais du haut de mes cinq ans.
Elle, elle m’a montré à prendre des mini bouchées de "steak’".
À les mâcher tout doucement,
Pour être capable d’apprécier la viande et mieux l’avaler.
Elle me manque,
mais je l’aime toujours en mon cœur.
J’aurais aimé que mes proches aujourd’hui la connaissent.
Elle sentait bon grand-maman.
Rédigé par : Annik Gélinas
Révisé par : Gabrielle Landry-Demers
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